Deuxième Anniversaire de la Déclaration d’Abidjan pour l’Eradication de l’ApatridieLes avancées du Sénégal et en Afrique de l’Ouest
Published: 22/Fév/2017
Source: UNHCR / Ministère de la Justice, Sénégal
Dakar, 22 Fév 2017: A l’occasion du 2ème anniversaire de la Déclaration d’Abidjan*, l’UNHCR et le Ministère de la Justice du Sénégal se félicitent des avancées dans la lutte contre l’apatridie.
“L’éradication de l’apatridie est une question de volonté politique. Les pays d’Afrique de l’Ouest ont respecté leur engagement de mise en œuvre de la Déclaration d’Abidjan. Ces avancées positives placent la région au premier plan de la lutte contre l’apatridie et démontrent qu’éradiquer ce fléau avant 2024 est tout à fait possible », a déclaré Liz Ahua, Représentante régionale de l’UNHCR pour l’Afrique de l’Ouest à Dakar.
L’apatridie est un fléau qui affecte au moins un million de personnes en Afrique de l’Ouest, selon les estimations de l’UNHCR. Les personnes concernées ne jouissent d’aucune nationalité, et pour cette raison, elles ne peuvent exercer leurs droits les plus fondamentaux, dont le droit à l’éducation, le droit au travail, le droit à une vie digne. L’apatridie est une cause d’exclusion et de souffrance.
Les sources de l’apatridie se trouvent avant tout dans les défaillances législatives. Dans la région, il y a par exemple des lois sur la nationalité qui excluent des personnes du bénéfice de la nationalité en instaurant des discriminations liées au genre ou à la race. D’autres lois ne veillent pas suffisamment à ce que tout enfant à la naissance puisse acquérir une nationalité. Ainsi beaucoup naissent dans un pays de la CEDEAO de parents originaires d’un autre pays de la CEDEAO, sans possibilité pour eux d’acquérir ni la nationalité du pays de naissance, ni celle de leur parents. Soit ils ne remplissent les critères d’aucune loi, soit ils manquent de preuve de leur naissance ou de leur filiation. A cet égard, un autre risque significatif d’apatridie est la difficulté pour beaucoup d’obtenir des documents établissant leur nationalité, souvent parce qu’ils n’ontpas été déclarés à la naissance. Ainsi on estime qu’au moins 60 millions de personnes ne sont pas documentées dans la région de la CEDEAO.
Le Sénégal a enregistré des avancées significatives en matière de lutte contre l’apatridie. L’Etat est déjà partie aux conventions internationales sur l’apatridie** et travaille à leur mise en œuvre. En 2013, la loi sur la nationalité a été modifiée, afin de consacrer l’égalité des hommes et des femmes en matière de nationalité. Cette révision avait aussi pour objectif de prévenir des situations d’apatridie résultant du fait que la mère ne pouvait pas toujours transmettre sa nationalité à son enfant. Par ailleurs, un projet de Code de l’Enfant, dont certaines dispositions visent à prévenir l’apatridie chez les enfants nés ou trouvés au Sénégal est en cours d’élaboration.
Conformément à ces engagements pris à Abidjan et avec le soutien du HCR, de nombreuses campagnes de sensibilisation ont eu lieu dans différentes régions du Sénégal, dans les écoles de la banlieue dakaroise, sur les télévisons nationales et sur les réseaux sociaux. Les artistes comme Bideew Bou Bess et Cheikh Lo ont aussi prêté leur voix à la campagne de lutte contre l’apatridie. L’objectif étant d’informer les populations sur les conséquences de l’apatridie, et l’importance de régulariser leur état civil.
Au Sénégal, le recensement de 2013 a révéléque plus de 20% de la population ne dispose pas d’un acte de naissance. L’acte de naissance, s’il ne confère pas en lui-même la nationalité sénégalaise, est déterminant pour faciliter son obtention.
«Nous sommes engagés à trouver des solutions pour nousassurer que toutes les personnes disposent d’un actede naissance» déclare Mme Habibatou Babou Wade, Point focal apatridie du Gouvernement***/ Directrice des Affaires civiles et du Sceau au Ministère de la Justice.
«A cette fin, environ 300000 jugements d’autorisation d’inscription de naissance ont été émisen 2015-2016 dans le cadre des audiences foraines. L’Etat a également baissé les prix des démarches pour l’enregistrement tardif des naissances afin de faciliter l’accès aux preuves d’identité dans tout le pays. C’est dans cette dynamique que le décret n° 2017-229 du 03 février 2017 est venu dispenser des droits de délivrance tous les jugements rendus en matière d’état civil à l’occasion des audiences foraines pour l’année 2017. En outre, le Sénégal est en train de numériser les actes de naissance pour faciliter et rendre plus fiable la délivrance des actes de naissance».
Plusieurs engagements majeurs ont été tenuspar les Etats. Ainsi, depuis l’adoption de la Déclaration, 12 Etats ont adhéré aux conventions sur l’apatridie****; l’Afrique de l’Ouest reste la région d’Afrique avec le plus grand nombre d’Etats parties. En outre, 7 pays ont engagé des révisions législatives et/ou constitutionnelles relatives à la nationalité. Tous les Etats ont nommé un point focal apatridie, et 13Etats ont développé un plan d’actionnational de lutte contre l’apatridie.
«L’Etat du Sénégal est résolument engagé dans la lutte contre l’apatridie, etveille à mettre en œuvre les engagements pris à Abidjan.» a rappelé M. Sidiki Kaba, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux.
Les avancées dans les pays membres de la CEDEAO sont très prometteusespour les personnes apatrides ou à risque d’apatridie. En l’espace de deux ans, plus de 45 000 personnes ont obtenu des documents confirmant leur identité ou leur nationalité. Les personnes concernées se sont vues ainsi attribuer une existence légale et de ce fait le plein exercice de leurs droits.
*http://www.unhcr.org/ecowas2015/FRE-Declaration.pdf
**Convention de sur le statut des apatrides, New York, 28 septembre 1954; Convention sur la réduction des cas d’apatridie, 30 aout 1931, New York.
*** Nommée en application de l’article 21 de la Déclaration d’Abidjan.
****Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gambie, Guinée Bissau, Guinée, Libéria, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone
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