Etat civil en République centrafricaine : enjeux et pratiques

Published: 1/Jul/2017
Source: Avocats sans frontieres (Belgique)

Effets sur l’accès à la justice et la réalisation des droits fondamentaux

Etude réalisée par Thierry Vircoulon

Résumé exécutif

Dans les deux villes considérées dans le cadre de cette étude (Bangui et Berberati), les actes de naissance sont l’exception plutôt que la règle pour une très grande partie de la population des mineurs/jeunes adultes. Cette étude met en évidence que :

  1. Les mineurs/jeunes adultes ont moins souvent leur acte de naissance que leurs aînés.
  2. Le niveau de déclaration des naissances est faible.
  3. La population urbaine est consciente de l’importance de l’acte de naissanceet souhaite en obtenir.
  4. Les usagers critiquent la lenteur du service d’état civil dans les deux villes.

Le facteur coût est le principal obstacle à l’acquisition d’un acte de naissance – et des documents administratifs en général. Mais la délivrance des actes de naissance, premier document administratif d’un individu, illustre aussi le fait qu’en Centrafrique, pays où les troubles et pillages récents ont abouti à de nombreuses pertes de documents individuels et à certaines destructions d’état civils municipaux, la« demande » de documents surpasse très largement « l’offre » par les administrations compétentes (mairies et tribunaux). Les effectifs et leurs méthodes de travail ne leur permettent pas de satisfaire la demande existante, bien que celle-ci soit fortement contrainte par la pauvreté de la population urbaine.

En théorie, cette situation pourrait se traduire par une réduction de l’accès de la population à ses droits socio-économiques. Mais, en pratique, ce n’est pas le cas : vu l’ampleur du déficit d’enregistrement de la population, les enfants sans acte de naissance accèdent à l’école comme ceux qui en ont. Loin de refléter les lois et règlements, les pratiques administratives s’en éloignent souvent et correspondent à des normes de tolérance qui sont négociées implicitement entre les administrés et les administrants. Par conséquent, cette étude démontre que, si le coût des actes administratifs est le principal problème pour la population, ces actes sont interchangeables et l’administration se montre souple, l’essentiel étant d’être capable de prouver son identité. Il n’est donc pas nécessaire de multiplier ces documents comme le voudrait la réglementation centrafricaine.

Sur la base de ce constat, cette étude formule des recommandations pour une amélioration de la délivrance des actes de naissance, en tirant les leçons des projets précédemment mis en œuvre par Avocats Sans Frontières autour de cette problématique.

Recommandations

  • Quantifier la proportion de la population sans acte de naissance dans les villes d’intervention
  • Afficher systématiquement la tarification des actes administratifs et des frais de justice
  • Ne pas exclure les quartiers musulmans lors des audiences foraines pour la délivrance de jugements supplétifs d’actes de naissance
  • Allonger le délai légal de déclaration d’une naissance de 1 à 6 mois
  • Simplifier la procédure d’obtentionde la déclaration de naissance
  • Réformer les relations financières entre les acteurs du système de délivrance des actes de naissance
  • Fournir des jugements supplétifs d’actes de naissance à la catégorie des enfants en CM2(5e primaire) dans une ville

Telecharger: https://asf.be/wp-content/uploads/2017/08/ASF_RCA_EtatCivil_201707_FR.pdf

Themes: Birth Registration
Regions: Central African Republic
Year: 2017